Martyn Bates
The Return of the Quiet
(BRED 81, Nov 1987, Lp/Cassette)

Review 1

by Bob Stanley (Enero, 1988, NME)

MARTYN BATES was one half of Eyeless In Gaza, a duo who produced some of the most wayward yet wonderful records of the early ’80s. Martyns voice has become something special over the years so his first proper solo LP should be a treat.

It isn’t. Somewhere along the way Martyn has become obsessed with chart fodder pop. All the subtlety of tunes like ‘July Late Afternoon’ is swamped in synthesised pomp. The exquisite folksiness of Bates’ songwriting is clouded by a desire to be ‘modern’ at any cost. The arrangements are just too crowded a heavy-handed version of Burt Bacharach’s ‘The Look of Love’ is typical. Then there’s the appropriately titled ‘Sad Song of Almost’ where a sumptuous melody is spoilt by needless synthetic strings. Compared with ‘She Moves Thru the Fair’ from the last Eyeless Lp, Martyn’s voice has never been more moving as he sings the most melancholy of folk songs with no need for ANY backing.

The greatest shame is that when the clanking whirring noises subside the natural beauty of the songs shines through both the title song and ‘You’ve Got To Farewell’ confirm that Martyn Bates’ songwriting is still strong and true. Elsewhere, ‘Return of the Quiet’ is little more than an exercise in commercial music making.


Review 2

by François Gorin (Télérama.fr, 4 juillet 2008)

J’ai passé l’été 1988 à écouter un album violet, The Return of the quiet. Le titre allait bien à la saison, le contenu n’était pas mal non plus. Martyn Bates a eu une façon de chanter bien à lui, que je connaissais par c¦ur depuis ses vocalises pour Eyeless In Gaza, le duo qu’il formait avec Peter Becker. Sûrement l’un des groupes les plus intensément dédaignés des années 80. Non affilié, trop lyrique, trop convulsif, peut-être moins new-wave que folk ? Le chant de Bates est tendu, éperdu, scandé. Il a l’air de chercher quelque chose en serrant les poings. De l’air ? L’extinction de son propre souffle ? Ou tout bonnement le calme et l’apaisement. Sur son premier album solo, le repos est moins le thème que l’horizon. Quand il se laisse aller à une valse, à moitié saoul de lumière ou de tristesse, les yeux clos, seuls les violons planent, pas encore sa voix.

La version qu’il donne de la perle Bacharach-David, The Look of love (pas celui d’ABC, donc) me prend aux tripes. C’est un comble avec cette chanson promise à la légèreté, presque à la transparence. Peut-être un doigt de mélancolie si vous y tenez… Celle de l’attente : How much have I waited… Mais maintenant je t’ai trouvé et tout baigne… Tout est radieux sourire et vapeurs de désir au soleil. Eh bien non, pas tout à fait quand c’est Martyn Bates qui prend les commandes. Il ne minaude pas la chanson comme Claudine Longet, ne l’emmielle pas comme Johnny Mathis, ne l’embrasse pas comme Dusty Springfield. Il ne la prend pas non plus avec les pincettes royales de Scott Walker. Et si le romantisme un peu toc et non moins prenant de Hal David était le mieux révélé par Bates ? Let’s make a lover’s vow and seal it with a kiss… Il a l’air tellement sérieux, c’en est quasi mystique. Il yodèle ça comme un muezzin. Les mots « look » et « love » passent à son moulin à prières. L’inquiétude et l’extase, ou pourquoi pas les deux. Burt Bacharach a-t-il entendu cette version ? Que peut-il bien en penser ?

Le meilleur du Return of the quiet est sur la face 2 (oui, je sais, ça fait terriblement ringard, tant pis). On y entend The Look of love, un Bacharach-David transfiguré par Bates proche de la lévitation. Sad Song of almost, une valse amère chantée le soleil dans les yeux (le soleil de quelqu’un qui vous aime un peu moins qu’hier). You’ve got to farewell commence comme une histoire, un conte : Once there was a day… Puis ne raconte rien. Les mots sont simplissimes chez Martyn Bates, on jurerait qu’il limite exprès son vocabulaire, le contraire d’Elvis Costello si on veut. Sur ce canevas de banal song, les reliefs se voient comme le nez au milieu du visage. Enfuis-toi avec cette grande promesse, chante Bates, car à partir d’aujourd’hui, « all I’ll say will be dishonest ». Sa voix me semble dire le contraire mais il pourrait bien devenir « malhonnête ».

Une mandoline chatouillait l’oreille au début, là ce sont les violons (de synthèse) qui créent un effet de suspension, d’apesanteur. Avec Eyeless In Gaza c’était l’harmonium de Becker. Sans lui Bates est passé de la chapelle désaffectée, gothique, taillée à même la roche, à la musique de chambre. A tel point que les aléas du rangement ont amené la tranche de son disque à se serrer entre Prefab Sprout et Louis Philippe (les couleurs allaient bien aussi). Qu’est-ce que je lui trouve de si extraordinaire à la voix de Martyn Bates ? Elle est fiévreuse, elle peut crisper. Elle était plus nue que d’autres et montrait ses défauts (Morrissey était très fort dans ce genre-là, mais il a soigné aussi ses petits effets). Je crois qu’à l’époque elle me vengeait un peu de la domination des garçons robotiques à mèche, avec ces intonations graves métalliques faisant plus vieux que leur âge et plus moderne que leur temps. Si vous ne voyez pas de qui je veux parler, ce n’est pas très important. Et puis ces gars-là avaient quelques bonnes chansons, il y a donc des chances qu’on les croise un de ces jours par ici.

A Philippe Auclair.